HAUT-KARABAGH
Qu'est-ce qu'on détruit ?
3 novembre 2020
Haut-Karabagh, la Montagne au trésor
Qu’est-ce qu’on détruit dans le Haut-Karabagh ? Qu’est-ce qui disparaît sous nos yeux dans le fracas des armes de destruction massive, des bombes à sous-munitions, dans le vol noir des drones ?
Les hommes oui, les femmes, les enfants qui vivent sur cette terre, mais aussi leur trésor : leurs monastères édifiés au sommet d’à-pics vertigineux, leur architecture sculptée dans la pierre la plus dure, leurs manuscrits enluminés par les moines-scribes, leur écriture au graphisme inspiré de la croix, leur langue, l’une des plus anciennes langues indo-européennes, si riche en phonèmes qu’elle s’ouvre à la musique. Tous les fruits d’un dépassement de soi. Ce qu’on appelle une culture, une civilisation.
On dit qu’à Gandzasar, la montagne-au-trésor, est enterrée la tête de saint Jean-Baptiste, que les Arméniens auraient sauvée et enfouie dans leur montagne pour la préserver d’autres outrages et l’honorer comme une relique dont le monastère serait la boîte.
Dans ces montagnes sombres comme dessinées au fusain, inconnues de tous, qui ont toujours été le flanc, le bouclier de l’Arménie, sont comme quintessenciés les trésors d’une des plus anciennes civilisations et de la première nation qui s’est déclarée chrétienne.
Le photographe Yvan Travert est parti sur ces routes, a saisi la vie avant que ne revienne la mort, et nous dévoile ce qui menace aujourd’hui de disparaître avec les hommes. Un trésor, notre trésor commun.
Claire Dedeyan
Photographies : Yvan Travert